Pierre Bergounioux.
Je vais devoir me
désintoxiquer de Pierre Bergounioux. Imaginez : je viens
de passer 30 ans avec lui. A cette mi-mai je repose la liseuse
qui m'a permis de vivre sa décennie 2001 / 2010. Au jour le
jour, le cahier intime de l'écrivain. Auparavant j'avais bien
entendu vécu, les derniers mois, ses deux décennies
précédentes. Je les avais lues sur papier celles là. Mais
comme parfois il me plait de lire au lit, imaginez ces lourds
bouquins, pourtant imprimés sur papier bible, imaginez leur
poids sur les poignets...
Que c'est
triste un écrivain. Je pensais qu'un écrivain, enfin un
écrivain de cette trempe, ce devait être un être un peu
surnaturel, vivant une vie de passion heureuse et exaltante.
Non, ce n'est pas drôle la vie d'un écrivain. Belle entreprise
de démystification.
Je vais devoir me désintoxiquer de Pierre
Bergounioux. Parce que je me suis habitué à le côtoyer
dans tous ses malheurs et ses angoisses, dans les plus
petits moments de la vie, parce que je me suis habitué à
partager les repas en famille ( coquillettes et steaks
hachés quéris au supermarché ) en compagnie de Cathy, des
"petits" Jean et Paul moins souvent maintenant, qui ne
sont plus si petits quoique encore nommés ainsi, ils ont
épouse voire enfants, mais aussi les séjours aux Bordes où
on retrouve Ninou et maintenant Jean-Pierre, où on a vu
grandir Marie.
Je vais
rester sans nouvelles pendant 10 ans encore. Ça
m'angoisse. D'autant que, les dernières années, il croit
souvent le moment venu de la mort. Aussi, dés la lecture
achevée je me suis précipité deviner des nouvelles en
regardant sur le net une conférence qu'il a donnée en
2012. Il parait en bonne forme, jusqu'au moment ou il va
se frotter les yeux longuement et avec insistance tout en
poursuivant. Migraine ophtalmique ?
J'avais
découvert Pierre Bergounioux à la parution de "Miette".
J'étais tombé en admiration pour l'écriture, pourtant si
loin de la simplicité qui m'agrée. Je m'étais senti aussi
totalement misérable : "jamais je n'arriverai à décrire
mieux les gens". De quoi rentrer toute envie d'écriture ;
d'autant que j'avais redécouvert peu avant Colette et que
je m'étais dit : " je n'écrirai jamais mieux..."
Un moment
je m'étais demandé si j'étais bien objectif devant P.B.,
si sa limousinité n'excitait pas quelque fibre chauvine.
Je m'étais rasséréné en me souvenant le peu d'intérêt que
m'avait procuré la lecture d'autre écrivain limousin plus
médiatisé.
Ceci étant,
je n'avais pas tout aimé de P.B.. Si j'avais dévoré tout
ce qui était paru dans la blanche de Gallimard,
particulièrement marqué par "Miette" premier lu, par "Ce
pas et le suivant", ravi de tous, j'avais moins été
convaincu par une parution chez Verdier " Le
chevron". Je suis revenu à Verdier pour le "carnet
de notes", le journal décrit.
Additif 2016 : 35 ans avec Bergounioux ! Je n'ai pas eu à
attendre 10 ans. Le dernier carnet de notes est sorti et
je l'ai lu. Il court sur 5 ans. Il est aussi épais que les
précédents. De plus en plus éprouvant de tome en tome.
Uniquement pour les fan... Mais courrez lire ses romans
parus dans la blanche de Gallimard.